A la rentrée prochaine, si votre enfant de 12 ans veut faire du foot, du rugby, du tennis, du basket ou encore de l’équitation, combien faudra-t-il payer ? Jusqu’où devrez-vous aller pour pratiquer son activité préférée à un tarif abordable ? Autant de questions auxquelles nous avons essayé de répondre.
Pour cette 9e édition du datajournalismelab, notre équipe s’est intéressée aux inégalités d’accès au sport dans la métropole bordelaise pour les enfants. Zoom sur les 28 communes qui la composent, afin de voir si les plus jeunes ont tous la même chance de faire du sport, aussi bien au niveau tarifaire que géographique.
Afin de réaliser cette enquête, nous avons recensé toutes les associations sportives de la métropole proposant des cours de football, d’équitation, de rugby, de tennis ou de basket, à des enfants. Puisqu’il n’existait aucune donnée, nous avons collecté l’ensemble des tarifs pratiqués par les clubs de ces cinq sports. Nous avons épluché les sites des clubs pour récupérer cette information et, à chaque fois que cela s’est avéré possible, nous avons vérifié les données par téléphone ou par mail. Un recoupement qui ne fût pas une mince affaire, en plein confinement. Tous les clubs étaient fermés et le personnel pas toujours disponible ni accessible. Pour chaque donnée, nous avons indiqué par un astérisque si elle a été vérifiée une ou plusieurs fois. Une fois les données récupérées, il a fallu créer notre propre base de données dans des tableurs. Pour les analyser et les rendre accessibles, l’utilisation de différentes visualisations nous est devenue indispensable. La première et la principale est une carte regroupant l’ensemble des informations sur les clubs de la métropole. Tarifs, localisation, catégorie de prix… En faisant apparaître ces chiffres sur l’ensemble des cinq sports, un premier constat est apparu : les communes ne sont pas toutes logées à la même enseigne.
Ce qui nous a poussés à diviser notre travail en 3 enquêtes distinctes, mais complémentaires pour nous faire une idée de la situation.
– Enquête 1 : Pourquoi de telles inégalités d’accès au sport en métropole ?
Zones blanches, inégalités d’accès, infrastructures, écarts tarifaires, nous avons analysé la répartition des clubs de sport dans la métropole.
– Enquête 2 : Licence de football, le prix de l’excellence
Subventions, localisation, réputation, politique sportive, autant de facteurs que nous avons mis en lumière pour comprendre les différents tarifs des clubs de football de la métropole.
– Enquête 3 : Ces clubs à cheval sur l’accessibilité
Alors que l’équitation est considéré comme un sport réservé aux élites, certains clubs tentent de le rendre un peu plus accessible.
Confinement oblige, cette année, c’est de notre canapé et aux quatre coins de la France que l’équipe s’est réunie par visioconférence pour mettre en œuvre cette enquête rondement menée. Aucun déplacement sur le terrain, aucune interview physique ni aucune photographie prise par nos soins. Un problème de taille que nous avons dû contourner, pour mener à bien cette semaine data. Alors comment réalise-t-on une enquête de terrain sans terrain ? Comment ressentir les cinq sens ? Comment s’accorder sur les contours journalistiques de trois enquêtes ? Une solution : innover.
Après avoir dessiné les frontières de notre sujet et établi un angle, la première phase a été celle du choix (parfois difficile). Quels sports ? Football (le plus commun), basketball (très pratiqué), équitation (l’une des pratiques les plus chères), rugby (représentant le Sud-Ouest) et le tennis (décrié pour être un sport fermé avec un public aisé). En sélectionnant ces disciplines, nous souhaitions toucher un variété de public de 12 ans. Un âge charnière, faisant partie de la tranche d’âge 10-14 ans, qui selon l’INJEP (Institut National de la Jeunesse et de l’Education Populaire) représente la population ayant le plus grand nombre de licenciés au sein des fédérations sportives françaises.
Pour analyser les inégalités d’accès au sport, on a commencé par visualiser le nombre de clubs par commune. L’objectif est de voir lesquelles n’ont pas ou peu de clubs et ainsi de déterminer les zones blanches. À partir de celles-ci, on a vite compris que le problème concerne fatalement celui des distances à parcourir du club par rapport aux lieux de résidence des jeunes.
Nous avons alors mesuré ces distances pour voir si certains jeunes habitent à plus de 15 minutes de voiture ; en estimant que c’est le temps maximal que les parents souhaiteraient consacrer au trajet entre leur lieu de résidence et le club de leurs petits.
Nous nous sommes aussi posé la question des infrastructures des clubs qui pourraient expliquer les écarts de tarifs. En analysant les données de chaque ville, nous nous sommes rendus compte que certaines disposent d’infrastructures mais pas de club. Les terrains sont utilisés par des clubs voisins, donc difficile de mettre en perspective ces données sans pouvoir les vérifier auprès des acteurs impliqués dans ce secteur. Or leur collaboration a été très limitée.
L’enquête s’est donc recentrée sur les inégalités liées à l’accès au sport, et ce en fonction de l’espace géographique et des tarifs de licences sportives.
Pour rendre accessibles ces données, nous avons choisi de les mettre en forme avec plusieurs types de visualisations. Celle qui ouvre notre enquête est une carte interactive qui recense toutes les données collectées et triées par nos soins, selon le sport et la localisation. Pour différencier les types de tarifs, il a fallu calculer, pour chaque discipline, l’étendue des prix ainsi que leurs quartiles. Ainsi, il a été possible de trier en trois catégories ces prix : si le tarif est inférieur ou égal au premier quartile de la série, il est qualifié de « bas ». S’il est compris entre le premier quartile et le 3e, le tarif est « modéré ». Enfin, s’il est supérieur ou égal au troisième quartile, il est « élevé ». A chaque tranche correspond une couleur.
Afin de réaliser les visualisations montrant les zones d’habitations accessibles en moins de 15 minutes en voiture depuis un club donné, nous avons utilisé Qgis. Dans ce logiciel, nous avons importé la localisation GPS des clubs sportifs, mentionnée dans notre tableur Google Sheets recensant toutes les données. Grâce à l’extension TravelTime dans Qgis, les algorithmes de TravelTime Platform ont permis de générer des isochrones, c’est à dire des zones accessibles depuis un point donné, selon un temps de trajet déterminé et selon un type de moyen de transport. Les isochrones générés dans Qgis à partir des localisations des clubs sont calculés pour un trajet de 15 minutes en voiture, à 17h en semaine. Les contours de ces isochrones ont ensuite été exportés au format géographique GeoJson, puis importés dans Datawrapper.
Ressources data utilisées en open source:
– Evolution et structure de la population par tranches d’âge à Bordeaux Métropole, Insee, 2016.
– Nombre d’équipements et de services dans le domaine du sport, des loisirs et de la culture en France, Insee, 2018.
– Subventions des associations sportives par la mairie de Mérignac, saison 2019-2020.
– Subventions des associations sportives par la mairie de Pessac, saison 2019-2020.
Outils utilisés pour créer les visualisations : Flourish – Google Spread Sheets – Carto.com – Khartis – Datawrapper – Qgis – Canva
L’équipe : Jeanne Maisiat, Léna Trichet, Juliette Pierron, Dany Tougeron, Thibault Lacoux, Erwan Morvan, Alexandre Keirle, Alexis Czaja